Accéder au contenu principal

Battlestar Galactica

Après les voyages, la musique et la politique québécoise, voici ma première chronique de télévision.

La meilleure émission de télévision des dernières années, à ma connaissance, est la nouvelle série de Battlestar Galactica, réinventée par Ron Moore et David Eick. Cette série, diffusée entre décembre 2004 et mars 2009 sur le réseau Sci Fi aux États-Unis (Space au Canada) est beaucoup plus qu'une simple saga de science fiction.

À première vue, on pourrait penser que c'est une série remplie de clichés, avec la grande blonde en robe rouge qui orne le premier coffret DVD, les vaisseaux spatiaux aux allures militaires et tout le reste. La série originale, diffusée à la fin des années 1970, était une sorte de dérivé télévisuel médiocre de Star Wars et n'apportait pas grand chose d'autre que du divertissement. Mais il ne faudrait pas se laisser induire en erreur par ces considérations.

BSG, pour les intimes, est en fait la série dramatique la plus audacieuse de la télévision américaine récente. On y traite de sujets aussi brûlants d'actualité que la religion, le terrorisme, l'occupation étrangère d'une population, l'érosion du pouvoir civil en temps de guerre, les stéréotypes de genre, et un thème commun à bien des oeuvres de science fiction, soit la définition de l'être humain en comparaison avec des machines hyper-intelligentes et physiquement quasi-identiques à un être humain (Philipp K. Dick, Azimov).

La prémice de la série est que les Cylons, qui étaient des robots mal dégrossis dans la première série, ont négocié une armistice avec les 12 colonies humaines et n'ont pas manifesté leur présence durant les 50 années qui ont suivi. Lorsqu'ils réapparaissent, c'est pour détruire les 12 colonies à coup de bombardements nucléaires en vue d'extérminer la race humaine. Environ 50,000 personnes survivent à l'hécatombe, la plupart regroupés autour d'un vaisseau militaire, le Galactica. On découvre assez rapidement que les Cylons ont développé la capacité à ressembler presque parfaitement à des humains, qu'il existe douze modèles de Cylons humanoïdes, dont plusieurs sont répliqués à de nombreux exemplaires, et qu'ils ont utilisé cette habilité à se mèler aux humains afin de déjouer les défenses des colonies.

Dès la première saison, le thème de la paranoïa engendrée par une menace intérieure (n'importe qui pourrait être un terroriste/un Cylon)est développé avec brio. On apprend éventuellement que certains Cylons à forme humaine ne savent pas qu'ils sont des Cylons et peuvent être "activés" à tout moment, ce qui évoque l'idée des "cellules dormantes" et du terrorisme "maison" (home grown).

Tout au long de la série, on se moque des stéréotypes sexuels. Le personnage de Starbuck, le pilote de chasse talentueux et rebelle de la première série, a été attribué à une jeune femme. Le leadership moral et politique de la bande de survivants est partagé entre une femme (la présidente) et un homme (le général). Tous les personnages ont des défauts et des qualités, font des erreurs, se remettent parfois en question, etc. On est loin des histoires de bons et de méchants. Même les Cylons sont complexes, ont des conflits entre eux (même quand ils sont du même modèle!)et sont guidés par des valeurs philosophiques ou religieuses.

Le sommet de la série a sans doute été atteint avec le début de la 3e saison. Les humains qui avaient décidé de s'établir sur la première planète habitable rencontrée en chemin (baptisée New Caprica) se retrouvent occupés militairement par les Cylons, ce qui donne l'occasion de développer des parallèles avec l'Iraq ou la Palestine. Plusieurs personnages majeurs de la série de retrouvent dans la résistance clandestine et violente à l'occupation. On va jusqu'à développer les thèmes de l'attentat suicide et de l'exécussion sommaire des traitres.

La qualité de l'écriture, du jeu des acteurs, de la production visuelle et sonore, sont toutes exceptionnelles. À voir et à revoir pour tous les amateurs de science fiction intelligente et pour ceux et celes qui s'intéressent aux liens entre la culture populaire et les enjeux sociaux et politiques.

À noter, la nouvelle série dérivée de BSG, intitulée Caprica, est tout aussi bonne, en tout cas pour sa première saison. Des thèmes similaires sont développés à travers l'hisoire des origines des Cylons et de leur religion monothéiste (la plupart des humains des colonies sont polythéistes). Caprica joue aussi au canal Space, les vendredi soirs. La première saison, d'une douzaine d'épisodes, a joué cet hiver.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Le choc des cultures

La décision d’Émilise Lessard-Therrien de quitter ses fonctions de porte-parole de Québec solidaire constitue un constat d’échec pour notre parti. Nous n’avons pas su donner la place qui lui revenait à une militante de grand talent dont le dévouement pour la cause est d’une profondeur certaine. On ne peut que souhaiter ardemment son retour en force dans un proche avenir.  Il y a deux manières faciles de réagir à ce départ. La première consisterait à simplement s’attrister, en focalisant notre attention sur l’expérience personnelle d’Émilise. C’est une réaction saine et essentielle, mais qui ne suffit pas. Au pire, ce serait une manière de blâmer Émilise pour ce qu’elle a vécu. L’autre, qui peut vivre avec la première, serait de faire porter tout le blâme à Gabriel Nadeau-Dubois et son entourage immédiat. Le porte-parole masculin et chef parlementaire a sans doute sa part de responsabilité dans cette situation (ce qu’il a lui-même admis), mais une telle logique ne permet pas non plu...

Qui peut battre Trump?

Jusqu’à tout récemment, il semblait inévitable que l’élection de novembre allait opposer le président sortant, Joseph R. Biden, et son prédécesseur, Donald J. Trump. Ce scénario avait pourtant été rejeté par bon nombre d’électrices et d’électeurs dans une série de sondages. Le débat du 27 juin est venu mêler les cartes en ouvrant la possibilité qu’une autre personne soit candidate pour les Démocrates. Mais peu importe qui se retrouve sur le ticket, il n’y aura pas de candidature de gauche comme celle de Bernie Sanders en 2016 et 2020.  Comment expliquer alors que les deux principaux partis présentent à la population pratiquement les mêmes choix politiques qu’il y a quatre ans? Comment expliquer que les Démocrates aient tant de difficulté à coaliser une majorité électorale solide contre la candidature d’un homme d’affaire reconnu responsable d’agression sexuelle, de diffamation et de fraude dans deux procès civils, et coupable au criminel pour avoir créé de faux documents en vue de ...

L’insoutenable légèreté d’être souverainiste

Depuis quelques temps, les initiatives se multiplient pour relancer et regrouper le mouvement souverainiste. Les appels se sont faits pressants lors de la dernière campagne électorale pour que "les partis souverainistes" collaborent afin de battre "les partis fédéralistes". La plus récente initiative du Nouveau mouvement pour le Québec (NMQ) avec son Congrès de la Convergence nationale va dans ce sens. Leur appel parle d'un "effort collectif pour réaliser l'indépendance du Québec" et pose comme diagnostic que "l'avènement de l'indépendance est obstrué par des luttes partisanes". [i] D'abord, il convient de rappeler que le PQ n'est pas indépendantiste. Son option est passée de la "souveraineté-association", à la "souveraineté-partenariat", en passant par le rapatriement de compétences à la pièce, pour aboutir à la "gouvernance souverainiste". Un parti qui s'engage catégoriquement en f...